Docteure Benaissa Meriem Rym, Chercheure à l’Université de Besançon et membre active dans différentes structures associatives françaises militant pour les droits des femmes, nous a fait l’honneur de contribuer à notre site par un article pertinent sur un sujet d’actualité, bien que demeurant encore tabou dans nos sociétés. Il s’agit des violences conjugales en lien avec le facteur environnemental et culturel
J’ai longtemps collaboré au sein d’une association venant en aide aux femmes victimes de violences conjugales. Au fur et à mesure du flux de ces victimes, je réalisais moult faits. D’abord, notre intervention avait lieu une fois que la violence au sein du couple atteignait un seuil d’intolérance extrême, ensuite, les dommages collatéraux étaient, lorsqu’il y’en avait, les enfants
?C’est à partir de constat, amère et terrible, que des questions ont commencé à fuser dans ma tête J’ai alors entrepris de faire un brain storming autour de la problématique récurrente du « pourquoi
Pourquoi ces femmes ont attendu d’en arriver à ce stade ? Pourquoi ne pas avoir déclencher des warnings, par instinct de survie, et sauver leurs peaux de leurs bourreaux ? Pourquoi investir, et s’investir, dans une relation à haut degré de toxicité pour en sortir traumatisées, abusées, en détresse absolue, n’ayant plus rien, financièrement ruinées, psychologiquement détruites, et physiquement à bout de force….POURQUOI
Je me suis alors intéressée à l’environnement socioculturel de ces femmes. La plupart des victimes venant à notre association étaient d’origine étrangère, essentiellement maghrébine et moyen orientale. A la question : avez-vous déposé plainte ? elles disent à l’unanimité : NON
Et pour cause, la honte, la peur, le qu’en dira-t-on, tout cela pèse lourd dans la balance. Elles savent pertinemment que si jamais elles « osent », leurs familles ne les soutiendront jamais, car elles passeront de victimes à coupables. Coupable de laver le linge sale en public, de divulguer la véritable nature monstrueuse de ces hommes avec qui elles ont vécu et à qui elles ont donné des enfants
Les enfants, deuxième argument mis en avant. En effet, dans les violences conjugales, les enfants sont une arme redoutable entre les mains du bourreau car à double tranchant. Les enfants sont facilement manipulables et influençables, une aubaine pour l’auteur des violences conjugales car il va en user et en abuser pour mieux contrôler sa victime, la museler et l’empêcher d’exister par elle-même et pour elle-même. Elles sont mamans, c’est leurs destins
Le destin, AL Mektoub, voilà l’ultime argument. Par croyance ancrée dans les esprits des victimes, elles sont fermement convaincues que tel a été la volonté divine. Par une foi religieuse transmise en héritage, elle se cantonnent à répéter en boucle « et qu’aurais-je pu faire ? c’était écrit ! (Mektoub), et puis nos mères, nos grands-mères ont ainsi vécu, qui sommes nous pour revendiquer le contraire, nos mères nous ont dit de patienter, c’est nos maris, on se devait de supporter pour les enfants et l’image sociale
Supporter ? une relation de couple est normalement faite de partage, et non de fardeaux à supporter. Un couple est sensé s’épauler, se soutenir, et non exercer une domination sous forme d’esclavage et de soumission de l’autre. Mais que faire, l’image de la femme est ainsi transmise dans nos sociétés : une femme doit se taire, patienter, accepter sans rechigner, et dire Amen à son époux, car si lui a des droits, elle n’a que des devoirs
Maintenant mesdames, il est grand temps d’ouvrir grand vos yeux et vos oreilles. Vous êtes nées, autant que ces messieurs, libres en droits. De ce fait, il faut savoir dire non lorsque la situation s’impose. J’en appelle à votre foi, nul autre hormis Dieu ne mérite adoration et vénération. Sachez que les insultes sont des violences, les humiliations devant autrui sont des violences, le dénigrement, le rabaissement sont des violences, vous priver de votre autonomie financière c’est aussi de la violence, contrôler votre vie est également de la violence, vous faire frapper, battre et torturer est également une violence
A cela une seule réponse : partez dès la première fois, ne soyez pas en plus victime du syndrome de Stockholm, n’ayez point d’empathie envers vos bourreaux car ils recommenceront, encore, et encore, ad vitam aeternam, jusqu’à ce que vous deveniez une loque humaine, dépourvue d’affect, un zombie, sans âme et sans ressenti
! Fuyez, battez-vous, vous êtes fortes, vous êtes belles, vous êtes FEMMES